Inspiré des livres de Fatima Elayoubi, « Prière à la lune » et « Enfin, je peux marcher seule », Philippe Faucon choisit pour héroïne une femme de ménage maghrébine et nous offre un éblouissant portrait de femme dans une mise en scène sobre et délicate.

Fatima élève ses deux filles, Souad et Nesrine, en faisant des ménages. Craignant que ses filles de 15 et 18 ans ne connaissent qu’un parcours frustrant et précaire comme le sien, elle tente de les aider du mieux qu’elle peut. Ces dernières, qui ont grandi en France, parlent mieux le français que leur mère mais ne comprennent pas très bien l’arabe. Fatima vit difficilement cette séparation par la langue au sein de la société et cette barrière de communication au sein de sa propre famille. Pour pallier cette frustration, elle tient quotidiennement un journal intime dans sa langue natale.

Philippe Faucon trace son chemin de réalisateur en marge des projecteurs depuis presque 20 ans et l’on peut regretter que ses films ne soient pas davantage connus tant la vision du cinéaste offre un éclairage salvateur aux raccourcis réducteurs. Son précédent film « La désintégration », sorti en 2012, décrivait le processus conduisant de jeunes Français à l’extrémisme et a été qualifié exagérément de film prophétique après les attentats de Charlie Hebdo. Avec « Fatima », le réalisateur met en scène les défis de l’intégration et les violences invisibles faites à ceux qui s’engagent sincèrement sur ce chemin. Mais « Fatima » (magnifique Soria Zeroual, actrice non professionnelle) n’est pas une victime, c’est une femme lumineuse, fière et digne malgré l’adversité.

« Fatima » a obtenu le Prix Louis Delluc 2015. L’interview de Philippe Faucon à la Quinzaine des réalisateurs.